« Les enfants, il est l’heure de s’habiller pour aller dehors ! Mettez vos vestes et vos chaussures ! »
Certains enfants le font tout de suite, d’autres ont besoin que la consigne soit répétée une fois, voire plusieurs. D’autres encore ne réagissent simplement pas. Dans ces moments-là, comment garder son calme, aller à la rencontre de l’enfant, lui laisser le temps nécessaire pour qu’il engage le mouvement vers cette transition ?
Dans le cahier Cemea n°276 intitulé « Autorité et attitudes éducatives », François Galichet, philosophe et formateur français, propose de concevoir l’autorité comme se situant « quelque-part entre l’usage de la force pure et celui de l’argument, dans un espace qui reste à définir. »
Entre force pure et force argumentative, l’autorité, par essence, ne peut exister sans qu’il y ait relation entre une instance faisant autorité (et exerçant l’autorité), et une autre acceptant l’autorité de la première. Dans le contexte de l’accueil familial de jour, l’autorité est déléguée par les parents, ce qui implique une médiation puissante dans la relation éducative. Qui plus est, chaque AMF entretient un rapport toujours différent avec les enfants accueillis, et compose en plus avec un groupe d’enfants, qui a sa ou ses dynamiques propres.
La multiplicité des relations entrant ainsi en jeu dans la construction d’une autorité éducative, rend le travail des AMF d’une complexité colossale. Et ce, redisons-le, sans pouvoir compter sur des pairs, à l’instar de l’accueil collectif de jour.
L’autorité, pour pouvoir exister, doit être constituée comme étant légitime : « La légitimité de l’autorité est donnée par les enfants via la preuve concrète visible au-travers des actions de l’adulte ». Autrement dit, l’adulte doit faire la preuve de la légitimité de son autorité, et non pas imposer cette dernière par la force, sous peine de basculer dans la domination pure et simple. Or, il ne peut faire cette preuve qu’en travaillant à instaurer un lien de confiance et de stabilité avec les enfants. L’enfant éprouvera au travers de la relation avec son AMF quelle place il peut occuper dans cette dernière, entre « la soumission et la toute-puissance ».
Pour construire une autorité éducative saine, les professionnel·les doivent, au travers de la réflexion et des réajustements incessants, développer une posture empreinte de cohérence et de responsivité. Une posture éducative solide engendre la reconnaissance, du côté de l’enfant, d’une compétence incarnée par l’adulte et lui garantissant un cadre dans lequel il peut évoluer en sécurité.
Le rôle des coordinatrices de l’accueil familial de jour est d’accompagner les AMF dans l’élaboration de cette posture fondamentale relative à l’autorité.
Le cahier Cemea que nous avons présenté dans ces lignes constitue lui-même une précieuse ressource pour épauler les coordinatrices dans cette tâche des plus ardues. L’un des enjeux majeurs traités dans cette publication est la question de l’équilibre très délicat à trouver entre trop peu de cadre (une permissivité hypertrophiée) et un cadre écrasant (abus d’autorité voire autoritarisme).
Terminons en notant que si nous avons évoqué à maintes reprises la relation éducative entre AMF et enfants, il faut aussi préciser qu’un travail analogue doit être accompli entre les coordinatrices et les AMF. Si nous transposons la citation exposée plus haut : « La légitimité de l’autorité est donnée par les AMF via la preuve concrète visible au-travers des actions de la coordinatrice ».
Pour aller plus loin :
– Cahier Cemea (2017). Autorité et attitudes éducatives. N°276.
– Cahier Cemea (2019). Règles, cadres, sanctions : émancipation. N°281.