Les enfants, actuellement, sont soumis à une double pression : on leur demande de réussir à l’école et il leur est aussi demandé de s’épanouir et de développer leur autonomie. Certains d’entre eux vivent dans des environnements particulièrement éprouvants. Beaucoup évoluent dans un univers très stimulant sensoriellement et intellectuellement, un univers de richesse excessive d’objets mais d’absence de vraies personnes accessibles, intéressées et disponibles. L’école est le lieu de toutes les difficultés.[1] Les enfants y sont traités collectivement mais la compétition entre les individus est la règle, même si elle est souvent occultée. On ne peut se distinguer et exister qu’en se démarquant du collectif par le bas ou par le haut. Il n’y a pas de valorisation collective.
« Je pense que l’éducation n’est plus au service de l’Homme, mais de la productivité et de la socialisation avec une intention de domestication des individus d’une génération à l’autre…Les valeurs doivent être cultivées à travers un processus de transformation de la personne et cette transformation est très éloignée de l’éducation qui est donnée actuellement… Les jeunes sont blessés affectivement et émotionnellement puisque les parents ont leur attention monopolisée par le marché du travail et qu’ils sont moins disponibles émotionnellement pour leurs enfants. Il y a une grande carence affective et beaucoup de déséquilibres chez les enfants »[2].
Certaines demandes familiales et scolaires sont vécues comme inhumaines car il y a trop d’écart entre ce qui est exigé et ce qui est possible en matière de croissance et d’organisation de vie. Indépendamment des responsabilités de la société, l’inhumain vient de notre manque de sensibilité relationnelle ou de notre peur de l’utiliser car nous croyons, à tort, qu’elle n’est pas compatible avec l’exercice de l’autorité. « Nul ne peut être éducateur, dit Freud, s’il ne peut être capable de sentir l’intériorité psychique de l’enfant. »[3]
Pouvons-nous être, dans les UAPE et les APEMS, ces professionnel.le.s qui connaissent la façon dont les enfants construisent leur univers mental et qui savent écouter l’enfant, ses doutes, ses angoisses et ses peurs ?
[1] Lévine, J., Moll, J. (2008), JE est un autre : pour un dialogue pédagogie-psychanalyse, Issy-les-Moulineaux, ESF
[2] Naranjo Claudio cité par Lagalis Marie-Claire, In : Dis, c’est quand qu’on est compris ? : dialogues d’enfants, Paris, Fabert, 2019, pp. 140-141.